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MH370

Le 8 mars 2014, un avion de ligne malaisien disparaît des écrans radar, avec 239 personnes à son bord. Deux ans plus tard, malgré les recherches les plus chères de l’histoire de l’aviation, le vol MH370 n’a toujours pas été retrouvé et on ignore encore ce qui a bien pu se passer dans le secret du cockpit. Retour sur une disparition devenue la plus grande énigme aérienne de tous les temps.

239 personnes à bord

MH370, disparition
en plein ciel

Le 8 mars 2014, un Boeing 777 de Malaysia Airlines décolle de Kuala Lumpur à 0h41 locales avec 227 passagers et 12 membres d’équipage en direction de Pékin. L’appareil est piloté par Zaharie Ahmad Shah, 53 ans, un commandant très respecté avec 33 ans d’expérience dans la compagnie nationale de la Malaisie. Son co-pilote est Fariq Abdul Hamid, 27 ans.

A 1h29, le MH370 disparaît des écrans de contrôle terrestres. Il s’est comme volatilisé. Détail troublant: si les radars civils ne peuvent repérer l’avion, on apprend quelques jours plus tard que des radars militaires américains ont capté des signaux montrant que l’appareil a continué de voler pendant sept heures.

De là, deux hypothèses sont avancées. Soit le Boeing a poursuivi sa trajectoire
vers le nord pour arriver, au bout des sept heures de vol, aux alentours de l’Afghanistan ; soit il s’est dirigé vers le sud et s’est abîmé au-dessus de l’eau,
à l’ouest de l’Australie.

Le premier cas semble peu probable car un avion de cette taille n’aurait pas pu
échapper aux systèmes de défense aérienne de la Chine et de l’Inde. Cinq jours après la disparition du Boeing, l’enquête privilégie donc l’arc sud et les recherches, qui s’étaient concentrées en mer de Chine méridionale les premiers jours, sont désormais menées dans la mer d’Andaman, à l’ouest de la Malaisie, bien loin du plan de vol initial de l’avion qui devait rallier Kuala Lumpur à Pékin. Un revirement inattendu qui exaspère les familles des passagers, alors que la Malaisie, en charge de l’enquête, oscille entre mutisme et déclarations confuses.

La Malaisie critiquée pour sa gestion de la crise

Dès les premières heures de cette crise sans précédent, la communication est verrouillée et les informations, délivrées au compte-goutte, révèlent l’ampleur du mystère qui entoure la disparition du vol MH370. Déclarations contradictoires, lenteur à réagir ou manque d’informations: cinq jours après la disparition du Boeing, les autorités malaisiennes et la compagnie Malaysia Airlines ne sont toujours pas capables de dire où est l’avion et sont sous le feu des critiques. Au même moment, la Chine, qui a perdu 153 de ses ressortissants, s’impatiente, d’autant qu’une nouvelle rumeur émerge dans ce flot d’incertitudes: l’avion aurait fait demi-tour. "Il y a pour le moment beaucoup d'informations, et c'est assez chaotique, ce qui fait que nous avons également des difficultés à confirmer si c'est exact ou non", déplore le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Qin Gang.
 
On apprendra plus tard que la Malaisie était au courant que des radars militaires et un satellite avaient bien repéré l’avion, plusieurs heures après sa disparition, mais a attendu plusieurs jours avant de dévoiler cette information, laissant huit navires chinois faire des recherches dans une zone où l'avion ne pouvait pas se trouver.
 
Une communication calamiteuse dont le paroxysme est atteint le 24 mars 2014, date à laquelle le vol MH370 est officiellement déclaré “abîmé dans l’océan Indien”, où il aurait chuté à cours de carburant, et pour lequel il n’y a plus aucun espoir de retrouver des survivants. Seize longues journées se sont écoulées depuis la disparition de l’avion. Les familles et les proches s’effondrent.

La détresse des familles

Ultime coup de poignard pour des proches déjà éprouvés par l’attente: les familles absentes à Pékin, où l’annonce a été faite, sont informées par Malaysia Airlines
via… un SMS

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Messages

La communication désastreuse de Malaysia Airlines

Il faut encore attendre deux mois pour que la Malaisie transmette le détail des données satellite utilisées pour déterminer la trajectoire du Boeing jusqu’à sa chute dans l’océan Indien. Ces données, enregistrées par l’opérateur britannique Inmarsat, confirment que l’avion a continué à voler sur des milliers de kilomètres, en direction du sud.

Des recherches XXL

Face à ce qui est toujours une énigme, et alors que les autorités malaisiennes semblent dépassées par l’ampleur des recherches à engager, 25 pays -dont la France- se mobilisent pour traquer les débris de la carlingue. La coordination des recherches dans l’océan Indien est confiée à l’Australie.

Une zone de recherche particulièrement difficile

Mi-mars 2014, les recherches se concentrent sur une zone située à 2500 kilomètres des côtes australiennes à la jonction des océans Indien et Austral. Cette étendue d’eau glacée de quelque 23.000 km2, est particulièrement inhospitalière à cause des vents forts et des courants marins importants qui la balaient.

Les conditions météorologiques ralentissent les recherches, et chaque appareil ne peut effectuer que deux heures d'observation avant de rentrer se poser à terre. En outre, non loin de là se trouve le gyre de l'océan Indien. Soit l'une des cinq zones de tourbillons océaniques dans le monde, sorte de vortex qui attire les déchets en mer. Ce cauchemar des écologistes est souvent désigné par les termes "continent-plastique", ou "île-poubelle".

Une semaine plus tard, de nouveaux calculs estiment que l’avion n’aurait pas pu se rendre aussi loin et penchent pour une
zone de crash située plus au nord-est. La nouvelle zone de recherche s'étend sur 319.000 km2, à environ 1.850 km à l'ouest de la ville côtière australienne de Perth. Soit la moitié de la superficie de la France.

"Ce n'est pas le genre d'endroit où vous aimeriez rester à chercher un avion pendant des semaines. On n'aurait pas pu trouver pire, et le moment de l'année ne pourrait pas lui aussi être plus mal choisi"

Erik van Sebille
océanographe à Sydney

Des recherches à plusieurs millions d’euros

Un mois après le début des recherches, et alors qu’il n’y a toujours pas de preuve tangible de localisation du Boeing 777, les opérations pour retrouver l’épave deviennent les plus chères de l’histoire de l’aviation, dépassant largement les
32 millions d’euros qu’avaient coûté les recherches du vol Rio-Paris, abîmé en mer en juin 2009. En un mois,
plus de 100 millions d’euros ont été dépensés par les pays impliqués.

Sept pays sont en première ligne des contributions financières: la Malaisie, la Chine, le Japon, les Etats-Unis, la Corée du Sud, l'Australie, la Nouvelle-Zélande. Ainsi, la seule mobilisation des satellites chinois aurait coûté 12 millions d'euros, selon
le China Times. De leur côté, à la fin du mois de mars, les Etats-Unis avaient déjà engagé 2,4 millions d'euros pour déployer leurs navires et avions dans la zone.

Un débris retrouvé
à La Réunion

Le 29 juillet 2015, environ 500 jours après la disparition du MH370, un morceau d’avion long de deux mètres est découvert sur une plage de l’île de La Réunion, relançant des recherches atones depuis plusieurs mois.

Il s’agit d’un flaperon (aileron), qui sera formellement identifié comme “correspondant avec certitude à celui du vol MH370” par le parquet de Paris, le 3 septembre 2015. Une identification rendue possible par le numéro d’identification spécifique apposé sur chaque élément qui compose un avion. Ce morceau de voilure est donc le premier, et pour le moment l’unique, débris retrouvé de l’avion disparu. Mais il est loin de résoudre le mystère à lui seul.

Les zones d’ombre

Deux ans après sa disparition, beaucoup de questions sur le vol MH370 restent sans réponse.

Comment un avion peut-il disparaître des écrans radar?

Plusieurs experts se sont étonnés que le Boeing, qui a survolé plusieurs Etats avant de se perdre dans l’océan Indien, n’ait été détecté à aucun moment par les systèmes de défense des pays alentour. Or, du système ACARS au transpondeur de l’avion, en passant par la radiotéléphonie, il existe tout un arsenal électronique pour suivre un avion à la trace en temps réel.

La radiotéléphonie



C'est le système de communication de base de l'avion. Il permet aux contrôleurs aériens de parler directement avec le pilote, depuis la tour de contrôle, et de lui transmettre diverses informations: conditions météo, état du trafic, ainsi que consignes et autorisations. Si ce système, qui fonctionne par fréquences, est très efficace lorsque l'avion survole des terres, il l'est moins au-dessus des mers, où se trouvent des zones non couvertes.
 


Le système ACARS



ACARS pour "Aircraft Communication Addressing and Reporting System". Il s'agit d'un système de communication codée installé sur l'avion, qui envoie des messages de type télétexte à diverses stations au sol, et ce tout au long du vol. Ainsi, les tours de contrôle mais aussi les compagnies aériennes et les constructeurs de moteurs sont tenus au courant en temps réel, grâce à des satellites, de l'état de l'avion, son fonctionnement général ou d'éventuelles pannes mécaniques.

Dans le cas de la disparition du Boeing 777, on sait que l'avion a continué d'émettre des signaux auprès du constructeur du moteur, en l'occurrence Rolls Royce, pendant plusieurs heures après sa disparition supposée.

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Le transpondeur



Cette installation radar permet aux contrôleurs aériens de tracer l'avion en direct sur leurs écrans de surveillance, au fur et à mesure de son avancée, en recevant des informations relatives à son identité, sa position, sa vitesse et son altitude. Un simple bouton situé dans le cockpit permet de désactiver ce système. Les contrôleurs ne sont alors plus en mesure de détecter l'avion. Dans le cas du MH370, les deux systèmes de communication du Boeing auraient été coupés à 14 minutes d'écart: le premier à 1h07, le second à 1h21. Ce qui pourrait signifier qu'ils ont été coupés manuellement et non pas brutalement arrêtés à cause d'un accident ou d'une explosion de l'avion.

Un arsenal électronique

Mais ce système a ses limites. Actuellement, la surveillance n’est pas assurée sur 70 % de la surface de la Terre, notamment au-dessus des océans, des déserts et des montagnes. Pour éviter qu’une telle tragédie ne se reproduise, un accord mondial a été trouvé en novembre 2015 pour permettre le suivi en temps réel des vols civils sur toute la planète, via les satellites. L’information sera ensuite renvoyée automatiquement aux stations terrestres chargées du contrôle aérien. Ce système doit entrer en vigueur en 2017. Source : lemonde.fr



Pourquoi l'avion a-t-il fait demi-tour?



Au moment de sa disparition, à 1h29, les systèmes de radar de l’avion, tels que le transpondeur (le dispositif permettant de localiser la position de l’appareil), étaient débranchés. Or, l’appareil figurait encore sur les radars militaires à 2h15 (18h15 GMT), changeant de cap en direction de la Malaisie, puis vers l’océan Indien. La Malaisie continue alors de capter des signaux satellitaires qui prouvent que l’appareil est resté en vol pendant environ sept heures. Ce brusque changement de cap est toujours inexpliqué.

On ignore si la feuille de route a été modifiée avant ou après le décollage, mais on sait que l'interface du logiciel était située entre le pilote et le co-pilote. Cette manoeuvre est généralement utilisée par les pilotes à la demande des aiguilleurs du ciel, pour éviter le trafic aérien ou le mauvais temps. Or cette nuit-là, le temps était dégagé. Et les derniers échanges entre l’avion et la tour de contrôle montrent qu’il n’y avait rien d’anormal: ni l'équipage, ni les systèmes de radar de l'appareil n’ont donné de signes d’alerte.

Les échanges des
54 dernières minutes

Un des pilotes à l'origine du drame?


Détail troublant: le cap du Boeing 777 a été modifié par un ordinateur de bord, donc depuis le cockpit de l’appareil. En outre, les appareils de communication et système radar ont été coupés à 14 minutes d’intervalle, ce qui accrédite l’idée d’une action manuelle volontaire et éloigne la piste d’une explosion dans les airs. “Toutes les pistes mènent au cockpit”, résumaient ainsi les enquêteurs en mars 2014. Dès lors, tous les regards convergent vers les deux pilotes.

Selon les enquêteurs, c’est Fariq Abdul Hamid qui prononce les derniers mots enregistrés dans le cockpit. Une information capitale alors que l’enquête cherche toujours à déterminer qui était aux commandes au moment de la disparition du MH370. Le message présumé du copilote, - d’abord traduit "Bonne nuit, Malaysian 370" avant d’être corrigé en “Bonsoir, Malaysian 370” -, a en effet été reçu 12 minutes après la désactivation volontaire du système ACARS (Aircraft Communication Addressing And Reporting System) qui permet d'échanger des informations entre l'appareil en vol et le centre opérationnel d'une compagnie aérienne. Le transpondeur, qui transmet les informations sur la position de l'appareil, a été manuellement désactivé deux minutes seulement après ce message. En fouillant dans son passé, les enquêteurs ont également découvert que Fariq Abdul Hamid avait laissé entrer des passagers dans le cockpit lors d'un récent vol, en violation des règles en vigueur.

Très vite,
les enquêteurs s’intéressent également à Zaharie Ahmad Shah de près, notamment parce qu’il possède un simulateur de vol à son domicile sur lequel des données ont été effacées.

Si l’un des pilotes est à l’origine de ces manoeuvres, le flou demeure sur ses motivations. S’agit-il d’un détournement volontaire, ou sous la menace d’un passager? S’agit-il d’un suicide, une piste relancée après le crash de l’avion Germanwings
piloté par Andreas Lubitz? Mais rien dans le passé des pilotes ne laisse penser qu'ils pouvaient être capables d'un meurtre collectif. Et Malaysia Airlines a déclaré qu’aucun signe d’instabilité psychologique n’avait été décelé chez le pilote ou le copilote. Les enquêtes menées sur les passagers –deux Iraniens voyageant avec de faux passeports avaient attiré l’attention des enquêteurs- ont également conclu qu’aucun d’entre eux ne présentait un profil suspect.



Pourquoi aucun passager n’a-t-il utilisé son téléphone?


Lors du 11-Septembre 2001, les passagers des avions détournés avaient pu contacter leurs proches par téléphone. Treize ans plus tard et alors que les téléphones mobiles sont omniprésents, il n’existe aucun signe que les passagers ont eu recours à leur téléphone. Comment expliquer un tel silence, alors que l’avion a continué sa course pendant plusieurs heures? Deux hypothèses sont plausibles: soit l’avion se trouvait dans une zone hors de portée des réseaux, soit les passagers étaient inconscients.


Selon A. K. Dewdney, professeur d'informatique à l'université d'Ontario occidental au Canada qui a conduit des recherches sur la question après le 11-Septembre, "aucun téléphone portable ne pourrait réussir (à se connecter) d'un avion au milieu de l'océan. Même à basse altitude".
 

Où l'appareil s'est-il écrasé?

Le fait que l’on retrouve des débris à La Réunion “ne signifie pas que le MH370 ait été si loin”, soulignait Xavier Tytelman, expert français en sécurité aérienne,
en juillet 2015 cité par
Lemonde.fr.












Mais la découverte d’un seul débris ne saurait suffire pour retrouver l’avion.

"Avec un seul débris d’avion, on ne pourra sans doute pas retrouver l’épave"

Paul-Henri Nargeolet,
principal explorateur de l’épave du Titanic et chargé des recherches du Rio-Paris en 2009

"Plusieurs chemins pourraient mener à des zones supposées du crash. Car plus le temps est long, plus il y a de trajectoires possibles"

Joël Sudre

Pourquoi n’a-t-on pas retrouvé d’autres débris de l’avion?


"Un débris c’est bien mais un débris c’est louche. Un débris en 17 mois, ce n’est pas normal. On l’a vu dans l’histoire de tous les crashs aériens, lorsqu’il y a des débris, il y a des centaines de débris. Le vol Paris-Rio, il y a eu 300 débris. Il faut trouver les autres débris", s’est ému Ghyslain Wattrelos, qui a perdu sa femme et deux enfants dans la catastrophe du MH370, en septembre 2015 sur RMC. Comment expliquer cette absence de débris, alors qu’un Boeing 777 mesure jusqu’à 74m de longueur et 65m d’envergure et compte des milliers de pièces? D’abord, la zone de crash n’a toujours pas été délimitée avec précision. On ignore donc toujours où l’avion s’est abîmé.

Ensuite, la zone de recherches, très large, est située dans une partie de l’océan Indien balayée de forts courants marins. Si des débris « creux » ont pu dériver à la surface, comme le montre cette animation du
New York Times réalisée à partir des données des autorités australiennes, d’autres comme le fuselage et les boîtes noires ont dû sombrer dans l’océan Indien. C’est l’hypothèse défendue par une équipe de chercheurs menée par un mathématicien, le professeur Goong Chen, de l’Université Texas A&M au Qatar. Selon l'étude publiée dans la revue Notices de l'American Mathematical Society, cette absence de débris découlerait du fait que l'avion a  réalisé un amerrissage en douceur avant de couler à pic dans l'océan Indien.

6 hypothèses pour une énigme

1

dépressurisation
de la cabine

2

Incendie
à bord

3

détournement
volontaire

4

La piste
terroriste

5

Un piratage
à distance

6

amerrissage
d’urgence

Deux ans après la disparition du MH370, l’unique débris du Boeing 777 retrouvé à ce jour ne permet pas de retracer le film de ce qui est arrivé à l’avion et ses 239 passagers. Si l’hypothèse du suicide d’un pilote est désormais écartée, six scénarios sont encore en suspens.

           Une dépressurisation de la cabine



C’est la piste privilégiée par les enquêteurs australiens. Une dépressurisation brutale provoque une brusque chute du niveau d’oxygène à bord, entraînant l’inconscience puis la mort des passagers et de l’équipage.

L’avion en pilote automatique aurait alors continué sa trajectoire pour se crasher dans l’océan Indien, faute de carburant, selon le scénario établit par les autorités australiennes. "On peut dire, je pense, qu'il est très très vraisemblable que l'appareil était en pilote automatique. Sinon, il n'aurait pas tracé la trajectoire très régulière qui a été identifiée grâce aux données satellitaires", déclarait le vice-Premier ministre australien,
Warren Truss, en juin 2014.

La chaîne d’incidents « correspondant typiquement à l’hypoxie d’un équipage incapable de réagir semble le mieux coïncider avec les éléments dont nous disposons sur les derniers moments du vol MH370 faisant route vers le sud », indique le rapport du Bureau australien de la sécurité aérienne ATSB publié jeudi. « Au regard de sa trajectoire à travers l’océan Indien, nous estimons que l’appareil était en pilote automatique jusqu’à ce qu’il se retrouve à court de carburant  », a souligné le chef de l’ATSB, Martin Dolan. Néanmoins, si cette hypothèse peut éclairer sur les circonstances du crash, elle n’explique pas la raison pour laquelle l’appareil a dévié de sa trajectoire une heure après le décollage.

1

"La pression partielle de l'oxygène dans l'air diminue considérablement et le cerveau n'est plus suffisamment oxygéné. Ce phénomène d'hypoxie entraîne très rapidement la perte de connaissance. Si la dépressurisation est extrêmement brutale et violente, l'inconscience survient en quelques instants à peine et un coma profond s'installe.

Si c'est bien une dépressurisation violente qui a eu lieu, je n'ai aucun doute sur le fait que les victimes de cet accident ne se sont rendues compte de rien"


expliquait au Monde le professeur Philippe Juvin,
chef du service des urgences de l'hôpital Beaujon (Clichy-la-Garenne, Hauts-de-Seine), en juin 2009, interrogé sur le crash du vol Rio-Paris.

          Incendie à bord

Le Boeing transportait en soute près de 400 kilos de batteries lithium, qui dégagent des gaz mortellement toxiques si elles prennent feu. Les émissions auraient pu empoisonner les passagers, ainsi que les pilotes. L’avion aurait alors continué à voler en pilotage automatique pendant plusieurs heures. Dans l’éventualité d’un incendie à bord, la procédure exige que le pilote tente de poser l’avion au plus vite, ce qui pourrait expliquer les raisons du demi-tour. Mais pas la désactivation des systèmes de communication de l’appareil.

2

           Un détournement volontaire de l’avion



Si le changement de cap de l’avion interroge, c’est en réalité une procédure courante, qu’elle soit décidée pour un incident à bord ou une urgence médicale ou technique. Dans le cas du MH370, l’élément le plus troublant reste la coupure, à 14 minutes d’intervalles, des systèmes de communication et radars de l’appareil. Une action manuelle a priori volontaire. En outre, les enquêteurs ont découvert dans le simulateur de vol retrouvé chez Zaharie Ahmad Shah qu’il s’entraînait à atterrir sur des pistes courtes. Le FBI, qui a été dépêché sur place pour saisir le simulateur, n’est toutefois pas parvenu à tirer de conclusion suffisamment étayée: le pilote complotait-il ou s’entraînait-il à des atterrissages d’urgence? Rien dans le passé des deux pilotes ne permet de les lier à une quelconque activité terroriste. Dès lors, peut-il s’agir d’un détournement sous la contrainte?

3

            La piste terroriste


Une attaque terroriste pourrait également être la cause du demi-tour de l’avion. Cette piste est toutefois mise à mal par la qualité du vol: après son changement de cap, l’appareil a en effet serpenté le long des frontières du Vietnam et du Cambodge pour éviter soigneusement d’entrer dans les espaces aériens des Etats survolés. Ce qui fait dire aux experts que les compétences nécessaires pour voler plusieurs heures sans être repéré relèveraient d’une préparation qui dépasse celle du 11-Septembre. En outre, aucune revendication terroriste n’a été proclamée, alors que ce type d’action est justement planifié pour marquer les esprits et en tirer une gloire dans la bataille de propagande.
 
Reste une hypothèse, plus fantaisiste, qu’affectionnent particulièrement
les convaincus d’un complot: l’avion aurait été détourné pour être précipité sur la puissante base militaire américaine de Diego Garcia, située dans l’océan Indien. Base militaire stratégique pour le Proche et le Moyen-Orient, Diego Garcia abrite également un centre de renseignement sophistiqué, à la fois comme base d’interception de satellites de télécommunication et d’écoute des câbles sous-marins. Détail troublant, des témoignages d’habitants des Maldives, rapportés par plusieurs médias dont Paris-Match qui s’est rendu sur place, assurent avoir vu un avion de ligne volant à basse altitude en direction du sud, où se situe la base donc, à une heure qui pourrait correspondre au vol de l’avion s’il avait suivi ce trajet depuis sa disparition. Mais pourquoi choisir un avion partant au nord, alors que d’autres vols de Kuala Lumpur vers l’Europe empruntent une route qui passe à l’ouest, justement près de Diego Garcia?

4

           Un piratage à distance


En avril 2013, un ingénieur du nom d’Hugo Teso avait fait forte impression lors d’une présentation à Amsterdam en affirmant pouvoir pirater un avion en pilote automatique à partir d’une application Android, exploitant notamment des failles de sécurité dans le système ACARS, qu’il avait conçu lui-même. Deux ans plus tard, en mai 2015, Chris Roberts, un expert en sécurité, assurait avoir pu prendre les commandes d’un avion alors qu’il était à bord. Pour réussir cet exploit, l’expert s’était connecté au système de divertissement qui permet aux passagers de regarder des films ou d’écouter de la musique via le boîtier de connexion installé sous son siège. Par ce biais, Chris Roberts était entré dans le réseau informatique de l’avion pour en prendre les commandes, avant d’être arrêté par le FBI à sa descente de l’avion qui reliait Chicago à Syracuse.

Un détournement depuis l’extérieur est-il possible? Ce scénario est étudié de près par les compagnies aériennes depuis le 11-Septembre. Objectif: prendre à distance le contrôle d’un appareil soumis à une menace. En 2006, Boeing a déposé un brevet de contrôle à distance, depuis un ordinateur connecté à l’intérieur ou à l’extérieur d’un avion. En outre, on sait qu’une vingtaine d’employés de la société américain Freescale Semiconductor –qui travaille sur cette technologie- étaient à bord du MH370. Mais là encore, rien dans les données fournies par les enquêteurs ne permet de privilégier cette piste.

5

           Un amerrissage d’urgence


Après la découverte d’un débris de l’avion à La Réunion, les familles des quatre Français disparus avec le MH370 avaient été reçues par le juge antiterroriste chargé de l’enquête française, Alain Gaudino, et l’expert technique aéronautique missionné, François Grangier. Selon lui, la manière dont la pièce était tordue laissait penser à un amerrissage plutôt qu’à un crash, ce qui indiquerait que l’avion est resté sous contrôle jusqu’au bout, rapporte Le Monde

 
Certains experts avancent en effet l’idée que l’absence de débris et les sept heures de vol sont le signe que l’avion a été détourné, a pu échapper à la vigilance des radars et qu’il a pu amerrir. Une manœuvre très délicate pour un appareil de cette taille. C’est pourtant la piste suivie par un groupe de chercheurs emmenés par le professeur Goong Chen, mathématicien. Les scientifiques ont modélisé cinq scénarios différents d'entrée dans l'eau
qui ne laisseraient aucun débris dans leur sillage. L’un d’entre eux pourrait correspondre au Boeing 777 de la Malaysia Airlines. Selon eux, le nez de l'avion pourrait avoir percuté la surface de l’eau selon un angle d'environ 90°, ce qui aurait eu pour conséquence de briser ses ailes uniquement, tout en gardant intact le fuselage de l'appareil. L'avion aurait ensuite coulé à pic, d'où l'absence de débris. Comme les précédentes, cette dernière hypothèse n’est pas vérifiée par l’enquête.

6

MH370, l’épilogue impossible ?

Deux ans après la disparition du Boeing de Malaysia Airlines, l’enquête semble dans l’impasse. Malgré l’étendue de ses recherches, elle n’a toujours pas permis de localiser l’épave de l’avion, ni de définir le scénario de ce qui a pu arriver au MH370 et des 239 personnes à bord. Une attente insupportable pour les familles des victimes, qui n’est pas sans rappeler celle qui avait suivi le crash du vol Rio-Paris en 2009.

A l’époque, il avait fallu deux ans aux enquêteurs pour localiser l'Airbus A330 d'Air France, à plus de 4.000 mètres de profondeur dans l'Atlantique, alors même que des premiers débris avaient été retrouvés une semaine après le crash. “A l’époque, notre zone de recherches était de 17.000 km². Soit un territoire un peu plus petit que la Suisse avec autant de montagnes, expliquait Paul-Henri Nargeolet, principal explorateur de l’épave du Titanic et chargé des recherches du Rio-Paris en 2009 à
20Minutes en juillet 2015. Dans le cas du MH370, l’Australie a défini une zone de 120.000 km².”
 
Une zone difficile à ratisser sans indice. Or, les boîtes noires du MH370, qui n’émettent leur position que pendant 30 jours, n’ont jamais été localisées. Un signal, très faible, avait été repéré par un navire de la marine australienne en avril 2014, laissant penser que les boîtes noires pourraient reposer à 15.000 pieds sous l’eau (4500m), l’équivalent de 12 Empire State Building, comme le montre cette infographie du
Washington Post. Mais il s’agissait d’une fausse piste. De son côté, l’Australie poursuit ses recherches et mobilise toujours trois navires. Selon ses projections, elle devrait avoir fini de ratisser les 120.000 km2 de la zone de recherche en juin prochain. Si aucune nouvelle information ou découverte ne vient relancer l’enquête d’ici là, les recherches de l’épave du MH370 seront officiellement abandonnées. Et les familles devront s’arranger avec les maigres éléments dont elles disposent pour faire leur deuil.

Disparition du

Deux ans d'énigme

1

dépressurisation
de la cabine

2

Incendie
à bord

3

détournement
volontaire

4

La piste
terroriste

5

Un piratage
à distance

6

amerrissage
d’urgence

FERMER

Ivan Valerio et Julien Mielcarek

La Malaysia Airlines a le profond regret de vous annoncer que le vol MH370 est perdu et qu'il n'y a aucun survivant

long format

Alexandra Gonzalez

infographie

Pierre Vecile

crédits photo

123RF PHOTO / Scott Betts / Christopher Ison / AFP photo / BFMTV

alt

réalisation

SAnDRINE COCHARD

direction artistique

Alec Agratina

par SAnDRINE COCHARD

rédaction en chef

Juste avant d’entrer dans l’espace aérien du Vietnam, quelqu’un envoie du cockpit un dernier message aux contrôleurs aériens de Malaisie: “Bonsoir, Malaysian 370.”
Il est 1h19, le MH370 est en vol depuis une quarantaine de minutes. Deux minutes plus tard, le transpondeur -qui communique notamment l'altitude, l'identité et la vitesse de l'avion aux autres appareils- ne répond plus. Le contact radio prévu avec Ho Chi Minh Ville n’arrivera jamais.